Gaz de schiste – suite – Gasland

J’ai pris le temps de regarder le film GasLand, deux heures édifiantes pour ce que j’y ai découvert !

Oui les Etats-Unis ont commencé à utiliser le gaz de schiste depuis dix ans … mais pas à petite échelle, à fond ! Des centaines de milliers de puits ont été creusés et sont en exploitation, sur plusieurs dizaines d’états. Dans certains cas même au coeur de réserves naturelles.

Voir un film, avec des images, des témoignages, c’est toujours plus frappant que de lire quelques belles phrases édulcorées. Là on voit, on voit bien, même très bien les apprentis sorciers que sont les américains, … et que pourraient devenir demain les européens.

Le retour sur l’environnement est édifiant

L’environnement est détruit, imaginez un bassin de la taille du bassin parisien, avec un puits tout les 500 m, partout, donc un maillage du terrain sur des dizaines de km2 avec aux quatre coins de chaque carré de 500 m, un puits qui récupère le gaz. Chaque puits laisse échapper dans l’air tout un tas de produits toxiques. Sur les alentours de Fort Worth au Texas, une des plus grandes villes de l’état, ces rejets toxiques sont équivalents à la pollution de la circulation urbaine.

L’eau est polluée. Lors de leur percement, et pour faire éclater la roche afin de libérer le gaz les millions de m3 d’eau sont injectés. Il ne s’agit pas d’eau pure, mais d’eau mélangée à un cocktail chimique des plus détonnant. Il y a quelques 500 composants chimiques différents, la plupart hautement toxiques. Donc des millions de m3 d’eau hautement polluée sont sciemment injectés dans le sol. Seule la moitié de cette eau est récupérée, l’autre moitié reste dans le sol, et se retrouve dans la nappe phréatique, et ressort via les cours d’eau et les puits. Plusieurs scènes du film montrent l’eau ragoutante qui sort de puits de la population, de l’eau totalement impropre à la consommation, car hautement polluée, plusieurs fois elle est même spontanément inflammable. Donc une destruction importante des bassins hydrologiques.

A peu près 2/5 de la surface des Etats-Unis serait concernée ! L’alimentation en eau de la région de New-York, de la Pennsylvanie, soit 19 millions d’habitants est menacée à brève échéance.

Voici la carte des bassins hydrographiques (en rouge et rose) en 2009 concernés par l’exploitation des gaz de schiste.

Carte des champs de gaz de schiste
Carte des champs de gaz de schiste

L’autre moitié de l’eau, celle récupérée, n’est pratiquement pas retraitée, elle est évaporée à l’air libre ou bien retourne dans le sol via les fuites des bassins de stockage où elle est entreposée. Donc tout le cocktail chimique est diffusé directement dans l’environnement.

Et il n’y a pas que l’environnement qui soit atteint mais aussi les populations et les animaux. De nombreux cas de pathologies graves du fait de consommation de l’eau sont reportés.

Voici deux documents qui listent le cocktail de produits chimiques probablement contenus dans l’eau utilisée en Pennsylvanie :

DEP_Frac_Chemical_List_6-30-10 chemicals Marcellus Shale

Bonne dégustation

On ne parle donc même pas de la planète que l’on va laisser aux générations futures, mais très directement des conditions environnementales fondamentales (eau, air) concernant la population actuelle, aujourd’hui.

Je me demande même si les Etats-Unis pourraient réparer les dommages déjà réalisés, si d’aventure ils décidaient de stopper l’exploitation du gaz de schiste. Vu l’échelle des dégâts, j’ai des doutes.

Le constat politique est tout aussi édifiant 

Comment les Etats-Unis ont-ils pu en arriver là ? Qu’ils polluent la planète et exploitent à leur intérêt les ressources du bout du monde, ça ils ont toujours su le faire, mais ils avaient toujours eu soin de protéger l’environnement de leur pays, du moins en grande partie. Qui n’admire pas les nombreuses réserves naturelles et les grands espaces des Etats-Unis ! Là ils ont vraiment l’air de mettre en l’air leur pays.

Le lobby de l’énergie a réussi à passer outre les grandes régulations environnementales des Etats-Unis : le « clean water act », le « clean air act » ont été contournés par des textes votés au Congrès dans les années mi-2000 lorsque Bush était président.

Comment se fait-il que les puissantes associations écologistes n’aient rien fait ou rien pu faire ?

Il serait intéressant de comprendre cela afin d’en prendre de la graine et de ne pas reproduire en Europe, ou ailleurs dans le monde.

(Il y a de grands projets de gaz de schiste au Canada, du côté du Saint-Laurent).

 

Ce qui me frappe aussi c’est la position dans laquelle se sont mis les Etats-Unis : l’abandon total du principe de précaution. A priori le système d’exploitation du gaz de schiste déployé est bon, ll faut que se soient les particuliers, les associations, qui démontrent les nuisances ! Si d’aventure ils arrivent à le faire, (pas de commentaire sur l’impartialité des études officielles et des éléments avancés par les compagnies pétrolières), alors ils seront indemnisés, financièrement. Mais quel est le sens d’une indemnisation financière lorsque la nature est détruite et polluée ? C’est pratiquer la politique de la terre brûlée. A l’échelle d’un pays, d’un continent, quel sens cela a-t-il ? Où est l’autre Terre où émigrer une fois celle-ci complètement brûlée et dévastée ?

Pourquoi dépenser des trésors d’intelligence et de ressources pour aller chercher de l’eau sur Mars et sur la Lune, alors que l’on pollue massivement celle de la Terre ?

Le principe de précaution doit prévaloir de façon absolue et non négociable. Interdiction de déployer un procédé tant qu’il n’a pas été prouvé qu’il n’est pas nocif.

Vous pouvez être cyber acteur et signer le moratoire sur www.cyberacteurs.org.

Pierre

février 2011

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